Davos

Davos

Un poème scénique et musical sur le devenir du capitalisme

2013-14

Un homme court sur place. Il s’appelle Hans Castorp. Il est un des dirigeants de Biotech, un puissant groupe spécialisé dans le bioengineering.
Une voix féminine l’accompagne dans cette course. Cette voix va prendre en charge la préparation physique et mentale de ce dirigeant, venu faire une intervention au forum économique mondial de Davos.

Dans ce qui pourrait être un centre de remise en forme de la station, il tente de se mettre en condition pour son allocution prochaine.
Mais progressivement, tandis que la voix évoque les différents états mentaux et affectifs de l’homme – ses souvenirs, ses craintes, mais aussi l’horizon de ses possibles – l’état physique de celui-ci se dégrade. Le centre de remise en forme devient alors un centre de soins, puis un centre de fin de vie.

À mesure que l’homme dépérit, c’est tout le réel refoulé qui fait retour sous la forme d’une menace, peut-être virale ou tumorale, qui le renvoie à sa condition mortelle, mais aussi à la dégénérescence des sociétés libérales dont il est une force aveugle.

crédit : Christian Lutz

crédit : Christian Lutz

A l’origine de cette proposition scénique de la cie Les Moteurs Multiples, il y a le roman de Thomas Mann, La Montagne magique, et un désir d’interroger la situation économique actuelle avec les moyens poétiques et formels du théâtre. Le roman de Mann, très métaphysique et envoûtant, montre l’évolution affective et morale de Hans Castorp, au prise avec le temps, la mort et le désir.

Les Moteurs Multiples ne proposent pas une adaptation du roman ; ils sont partis de la coïncidence entre le lieu où se déroule le roman, le sanatorium de Davos, et le lieu où se déroule le Forum économique mondial de Davos où se rencontrent dirigeants politiques et acteurs influents du monde économique, où peut se décider le sort des populations mondiales. DAVOS se présente comme un récit intime du capitalisme actuel. Un poème scénique, plastique et musical. Comme dans La Montagne magique, il s’agit de manifester le temps, de rendre palpable la durée vécue. Pour ce faire, le travail sur les lumières, les sons, ainsi que les images produites par le texte, permettent au spectateur de s’immerger dans un univers plastique et sonore évocateur. Des interrogations métaphysiques, comme notre rapport à la maladie et à la mort, au temps, à notre finitude, se trouvent révélées par une écriture de plateau qui utilise les éléments formels du théâtre.

Le personnage principal, comme dans La Montagne magique, pense venir pour un court moment, le temps du Forum, et se prépare pour sa conférence. Mais comme dans le roman de Thomas Mann, il va se révéler malade. La maladie va se déclarer. Mais elle était déjà là, en instance, avec comme horizon, la mort, qui est le possible annulant tous les possibles.

Castorp est engagé dans un processus qui le mènera à sa perte. A mesure qu’il décline, des images du passé ressurgissent, évoquées aussi par cette voix qui ne cesse de l’accompagner, tel un coach sportif, un psy ou sa voix intérieure.
A mesure que le corps de Castorp se rappelle à lui dans la maladie, la réalité du monde refoulée, la réalité des peuples, ceux d’en bas, laissés pour compte, ressurgit.

Alors qu’il ne quitte plus les hauteurs de Davos, qu’il semble condamné à rester dans ce centre sans espoir de retrouver la plaine, c’est le temps qui défile, un Forum chassant l’autre, un cycle de saisons recommençant. Condamné à refaire les mêmes gestes, les mêmes séances de Qi Gong, mais rendues plus difficiles à chaque fois par la maladie qui progresse, Castorp revoit des éléments du passés se mêler aux événements de son époque.

Conception : Lise Ardaillon et Sylvain Milliot. Mise en scène : Lise Ardaillon. Texte et musique : Sylvain Milliot. Création lumières : Vincent Panchen. Scénographie: Lise Ardaillon, Vincent Panchen, sur une idée originale de Mathieu Bouvier. Avec : Lise Ardaillon, Roberto Molo. Régie son : Maurizio Priod. Régie plateau : Frédéric Todeschini. Conseillère Qi Gong : Marie-Christine Sévère. 

Coproductions :Bonlieu Scène Nationale, Annecy. Théâtre Saint-Gervais, Genève. Dans le cadre de PACT, (Pôle Artistique et Culturel Transfrontalier) projet Interreg-IV France Suisse 2007-2013.
Soutiens : Ville d’Annecy, Conseil Général de Haute-Savoie, ODAC 74, Région Rhône-Alpes, DRAC Rhône-Alpes pour l’aide à la création, L’L lieu d’accompagnement pour la création, Bruxelles.

DAVOS from Mathieu Bouvier on Vimeo.
Extrait sonore de la pièce.